Quelle belle découverte que cette arête Mittellegi à l’Eiger avec Camille !
Techniquement pas si difficile (quoiqu’un peu de neige dans la face nord avec les pieds qui glissent, ça laisse des souvenirs… merci les cordes en place !)
Mais une course bien longue, toujours sur le fil de l’arête, une ambiance incroyable et un sommet sacrément mythique, au bord de la fameuse face Nord de l’Ogre…
Merci à toi Camille pour ces moments exceptionnels là-haut, merci à Jé pour ses bons conseils, et un carton rouge pour le refuge de la Mittellegi Hütte et son accueil archaïquement sexiste et/ou raciste…
Retour sur les faits...
Nous arrivons avec Camille au refuge Mittellegi Hütte dans l'après-midi, après une rapide montée depuis le train de Grindelwald.
La gardienne ne retrouve pas notre réservation faite 2 jours avant par mes soins, mais heureusement il y a de la place.
Nous mangeons au premier service dans ce minuscule et magnifique édifice.
Nous devons insister pour pouvoir payer après le repas afin d'aller nous coucher : nous aurions dû attendre la fin du deuxième service mais la gardienne nous fait la facture en nous faisant une tête de 10 mètres de long. Pas de tarif pour les guides.
Je comprends. La vie de refuge, ça fait partie du jeu.
Impossible d'obtenir l'heure du petit-déjeuner : il faudra que je me relève plus tard pour voir l'affichage sur la porte, après le deuxième service, non négociable. Soit.
Les petits-déjeuners sont organisés toutes les 20 minutes, échelonnés afin que ça ne bouchonne pas sur l'arête, logique et intelligent.
Lorsque je me relève pour connaître notre heure attribuée, mon nom ne figure pas sur la liste.
En pleine saison, c'est encore compréhensible, les aléas.
Je retourne voir la gardienne pour lui dire, elle me répond que nous aurons donc l'heure du dernier petit-déjeuner, une heure après les premiers.
Je demande aimablement s'il serait possible d'avoir un petit-déjeuner plus tôt, étant donné que notre cordée est assez efficace.
Mais non, c'est réservé aux guides.
Je me permets de lui rappeler encore une fois que je suis guide (elle semble l'avoir déjà oublié plusieurs fois aujourd'hui...)
Rien à faire, c'est organisé comme ça, il n'y a plus de place.
Soit, je peux comprendre.
Intervention surprise d'un guide suisse très sympa qui entend la conversation et se permet, surpris que je sois guide malgré le manque de signes ostentatoires, de me proposer d'échanger son petit-déjeuner au premier réveil contre le mien au dernier, comprenant que ma cliente semble bien plus rapide que son client !
Adorable.
Il ne nous reste plus qu'à faire valider le changement d'horaires par le gardien, guide lui aussi.
NON. La réponse est catégorique et sans appel.
On ne change pas l'ordre des choses. Et c'est absolument non négociable.
Un guide suisse doit avoir le premier petit-déjeuner et une française le dernier, c'est ainsi.
Amen.
Le lendemain, nous partons donc les dernières, derrière 12 cordées que nous doubleront presque toutes à la montée, sans rancune et avec un sourire faussement naïf et bienveillant ("très jolie ta veste", "vous permettez ?")
Mais quel drôle de monde....... Ça fait bien mal au coeur...
Il en faudrait plus pour gâcher le plaisir d'une si belle montagne mais quand même, vivement que ces mentalités évoluent...